Arrivé cet été chez Philibert, The 7th Continent est un jeu d'aventure qui a certes un peu de bouteille, mais qui fascine toujours autant tant l'expérience de jeu proposée est unique et repousse les limites. On a voulu en savoir plus sur l'histoire du jeu. Bruno Sautter et Ludovic Roudy, les deux auteurs et fondateurs de Serious Poulp, ont répondu à nos questions. Voici l'interview !
Philibert : Bonjour Bruno et Ludovic, pouvez-vous vous présenter et nous dire ce que vous avez fait dans le milieu ludique jusqu’à présent ?
Ludovic et Bruno : Bonjour, nous sommes Ludovic Roudy et Bruno Sautter, co-fondateurs de la maison d’édition Serious Poulp et co-auteurs des jeux The 7th Continent, Just One et The 7th Citadel à paraître début 2024. Avant cela, nous avions créé les jeux Steam Torpedo et 8 Masters Revenge qui sont moins connus.
Philibert : Que faites-vous quand vous ne travaillez pas pour Serious Poulp ?
Ludovic : Je joue à tout, peins beaucoup de figurines et réfléchis à des idées de jeux. Je lis un peu aussi (bandes dessinées, livres mais pas beaucoup de roman, règles, etc.).
Bruno : J’élève mes filles et profite de la vie, principalement en jouant, en lisant et en m’aventurant dans la nature (sans bolas, mais avec mon chien).
Philibert : D’ailleurs pourquoi avoir choisi ce nom pour votre maison d’édition ? Parce qu’à vous deux, vous formez un octopode ?
Bruno : L’idée est de Ludovic (comme souvent 😊). Je lui laisse le soin de répondre.
Ludovic : Le poulpe est un animal intelligent, souple, attachant et qui a la capacité de pousser beaucoup de pions/figurines en même temps 😊. Il est également assez présent dans les univers fantastiques et ludiques : Cthulhu, Jessie la mascotte de « Jeux et Stratégie », ADD, etc.
Philibert : Parlons de The 7th Continent, comment est née l’idée du jeu ?
Ludovic : L’idée de départ du jeu remonte à mes 10 ans. Je faisais beaucoup de prototypes de jeux à l’époque, dont un qui ressemblait au 7e continent. Il s’agissait d’un jeu d’exploration qui utilisait des enveloppes sur lesquelles j’avais dessiné les terrains qui s’assemblaient et à l’intérieur desquelles on glissait des cartes « événement ». C’était une merveille d’ergonomie ratée, mais les fondations d’un jeu d’exploration et d’aventure étaient là. J’avais aussi, entre autres, commencé l’écriture d’un très mauvais Livre dont vous êtes le héros. Je n’étais pas très concentré durant mes cours au collège, mais je griffonnais pas mal de plan de donjons, de tables de réussite et de dessins de monstres et de pièges.
Bruno : À partir de cette idée de base, nous avons créé un jeu dont la mécanique centrale peut se résumer à créer un plateau de jeu constitué de cartes numérotées représentant un continent mystérieux sur lesquelles les joueurs vont déplacer leur figurine et interagir avec leur environnement (en explorant une grotte, utilisant les plantes dessinées sur le terrain où il se trouve, faisant du feu, dénichant des numéros cachés, etc.). Un peu comme si on remplaçait les chapitres d’un livre dont vous êtes le héros par des cartes illustrées avec du texte ayant chacune un numéro au verso… et beaucoup de choix (Où vais-je ? Que fais-je ? Dois-je ou non actionner ce levier ? etc.).
Philibert : The 7th Continent est à la croisée des chemins entre le jeu de société, le jeu de rôle et le jeu vidéo. Est-ce que le jeu est un concentré de toutes vos passions ?
Bruno : Oui, clairement. Nous y avons d’ailleurs intégré de nombreux « easter eggs » (« clins d’œil »), en référence au sorcier de la montagne de feu et à Indiana Jones pour ne citer que ceux-là. Une façon de témoigner notre reconnaissance aux œuvres ayant marqué notre passé de joueurs et qui nous ont inspirées pour The 7th Continent.
Ludovic : C’est pas faux 😉, surtout en rajoutant le graphisme, qui est ma formation, et la randonnée…
Philibert : Sa mécanique est proche des livres-jeux, du type Les livres dont vous êtes le héros. Quel rapport entretenez-vous avec ces jeux ?
Ludovic : Le jeu en général a orienté ma vie. Le jeu de rôle notamment (DD, ADD, L’Œil Noir, L’Ultime Épreuve, etc.) et Les livres dont vous êtes le héros. J’ai adoré ces premières expériences qui m’ont profondément marqué ainsi que les labyrinthes-jeux de Didier Guiserix dans la revue « Jeux et Stratégie ». J’y ai découvert que le plaisir et l’immersion procurés par le jeu pouvaient continuer bien après la partie et que le jeu avait également une dimension solitaire. J’ai régulièrement des périodes de reprise de JDR et je suis toujours un lecteur de LDVELH.
Bruno : J’ai beaucoup pratiqué les LDVELH. Avec le jeu de rôle L’Œil noir, Full Metal Planet et Blood Bowl, ainsi que l’Apple IIC de mes parents, ils m’ont donné envie de créer des jeux à mon tour. J’avais personnellement une préférence pour la série Défis Fantastiques de Ian Livingstone et Steve Jackson : des titres comme l’épreuve des champions (j’adore les combats de gladiateurs 😊), le labyrinthe de la mort ou encore le combattant de l’autoroute (j’adore aussi les gladiateurs à la sauce Mad Max).
Philibert : The 7th Continent a fait l’objet d’une campagne sur Kickstarter en 2015. Pourquoi avoir choisi le financement participatif ?
Ludovic et Bruno : Le choix s’est imposé à nous dans la mesure où les temps de développement du jeu et ses coûts de fabrication étaient impossibles à supporter pour un petit éditeur indépendant. On peut donc vraiment dire que sans Kickstarter et les milliers de « backers » qui nous ont fait confiance, et que nous remercions au passage, The 7th Continent n’aurait pas pu voir le jour.
Philibert : La campagne fut une belle réussite (Plus de 12 000 contributeurs). Le jeu a également rencontré un beau succès critique avec notamment de nombreuses nominations et des récompenses, comme le Tric Trac d’Or. Vous vous attendiez à un tel succès ?
Bruno : Il est difficile d’anticiper le succès. Nous avions fait un gros travail de préparation pour la campagne Kickstarter de 2015 (salons, presse, forums, influenceurs, etc.). Du coup, plusieurs milliers de joueurs étaient au courant que la campagne allait se tenir avant qu’elle ne démarre. La chance a fait le reste !
Philibert : The 7th Citadel, votre prochain jeu, semble prendre le même chemin. Pouvez-vous nous parler de sa campagne Kickstarter ?
Ludovic et Bruno : The 7th Citadel est un jeu coopératif qui se joue de 1 à 4 joueurs. Il reprend la mécanique centrale d’exploration de The 7th Continent, en remplaçant le volet « survie » de son prédécesseur par une dimension « aventure » et en lui apportant de nombreux ajouts sur le plan matériel, narratif et gameplay. Le jeu se déroule dans un univers med-fan original qui n’a pas de rapport avec celui de The 7th Continent (qui était plus proche de Jules Vernes et de Lovecraft). Le jeu a été soutenu par plus de 33 000 contributeurs sur Kickstarter qui s’apprêtent à recevoir leur pledge (exemplaire du jeu) d'ici à quelques mois.
Philibert : Pouvez-vous nous donner des infos fraîches sur The 7th Citadel ? Vous en êtes où ? Sera-t-il disponible sur Philibert ?
Ludovic et Bruno : Les jeux sont en train d’être imprimés chez le fabricant. À ce stade, notre travail consiste à suivre l’avancement de la production et à préparer l’expédition des jeux une fois qu’ils seront prêts. Pour ce qui est de la distribution du jeu post-livraisons, c’est un sujet sur lequel nous planchons actuellement et rien n’est encore arrêté.
Philibert : Vous semblez détenir les clés du succès. Quel est votre secret ?
Ludovic et Bruno : Nous avons eu notre lot d’erreurs et d’échecs. L’expérience acquise nous a permis d’éviter les principaux écueils. Après, il n’y a pas vraiment de secret, pas plus qu’il n’y a de recette miracle. C’est avant tout une question d’envie, de préparation… et de chance.
Philibert : À quoi ressemblera l’année 2024 pour vous ?
Ludovic et Bruno : Le début de l’année sera dédié à accompagner l’arrivée de The 7th Citadel chez les joueurs qui ont soutenu le projet. Compte tenu des volumes, cela implique beaucoup d’échanges avec la communauté et de SAV. Pour le reste, nous avons plusieurs projets dans les cartons auxquels nous allons prendre beaucoup de plaisir à donner vie !