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Les métiers ludiques : "Dans le jeu de rôle, je suis un peu un oiseau rare"

Les métiers ludiques : le relecteur Olivier Larue
Le Philiboy Sébastien
Sébastien
Mis à jour le  07/11/2023
#article

Philibert vous propose de découvrir les métiers qui peuplent le monde du jeu de société. À travers des portraits humains, nous en apprendrons plus sur certains rouages de la sphère ludique. Dans ce huitième épisode, nous avons échangé avec Olivier Larue, qui nous présente son travail de relecteur.


Philibert : Salut Olivier, peux-tu te présenter ?


Olivier : Bonjour ! Olivier Larue, animateur de la chaîne Twitch VLTIMA VERBA, la chaîne du jeu de rôle et de l’éloquence, auteur et relecteur auprès de plusieurs éditeurs dont Arkhane Asylum Publishing, Black Book Éditions et EDGE, et professeur de littérature et d’éloquence dans le supérieur. Passionné par le jeu de rôle, bien évidemment, la langue, la poésie, le MMA, le piment et la vie en général !



Philibert : Peux-tu nous parler de ta formation et résumer ton parcours ? Comment devient-on relecteur ?


Olivier : J’ai une formation littéraire : je suis détenteur d’un Master de Lettres modernes spécialisé en écriture créative et d’un CAPES de Lettres. J’ai beaucoup écrit avant de devenir prof de français au lycée et puis j’ai simplement demandé à Arkhane s’ils n’avaient pas besoin d’un relecteur sur Mage l’Ascension dont je suis assez fan… On m’a dit « banco », parce qu’on avait justement besoin de quelqu’un qui, en plus de connaître l’univers de Mage, n’était pas allergique à la grammaire. Dans le jeu de rôle, les gens sont très souvent des passionnés, mais il est rare qu’ils possèdent une véritable formation pour exercer les métiers de l’édition ; je suis un peu un oiseau rare et je crois que c’est ce qui fait que j’ai du travail. Les gens avec mon CV peuvent travailler dans l’édition traditionnelle tout en étant mieux payés, mais ce n’est pas ce que je désirais.



Philibert : On entend aussi parfois le terme de "correcteur". Existe-t-il une différence entre relecteur et correcteur ?


Olivier : S’il y en a une, je ne l’ai toujours pas captée ! Ha ha !



Philibert : Quelles tâches incombent au relecteur ?


Olivier : Je n’ai fait que peu de relectures en dehors du jeu de rôle, mais mon travail consiste à corriger les typos, les coquilles et les erreurs, à faire des propositions pour améliorer le style, voire de relever des incohérences. Je lis et je souligne tout ce qui ne va pas, puis je fais mon retour. Ce qui est important, c’est que je ne suis pas le garant de la traduction, je ne repasse pas derrière un traducteur pour pointer ses erreurs de traduction, c’est son travail et ce serait presque grossier que de revenir dessus. C’est le texte français qui m’intéresse dans le cas d’une traduction.



Philibert : Le métier de relecteur s’exerce-t-il différemment dans le monde du jeu ?


Olivier : Dans le monde du jeu de rôle, je pense avoir une casquette qui confine parfois au rôle de l’éditeur. Je peux remanier des passages du texte, proposer des corrections plus larges concernant les règles ou la cohérence de l’univers, assurer le suivi d’une traduction à l’autre pour ne pas trop changer les termes auxquels les joueurs sont habitués et je peux même pointer de petites erreurs de traduction ou des imprécisions lorsqu’elles mettent en péril la compréhension des règles. Je suis le dernier maillon avant la maquette et l’impression, il faut que le texte soit aussi impeccable que possible. À tout point de vue, orthographe, grammaire, style, clarté, règles, etc.



Philibert : Quand tu travailles sur un projet, qui sont tes interlocuteurs ?


Olivier : Je travaille avec l’auteur, le traducteur, l’éditeur et le responsable de gamme. Dans un milieu aussi petit que le jeu de rôle, le directeur de la maison est assez souvent impliqué dans la production, on travaille à la fois dans notre coin et tous ensemble. C’est une ambiance que j’aime bien. Je sais que je suis tranquille sur ma part, mais que je peux contacter les uns et les autres en cas de pépin.


Olivier Larue, relecteur dans le jeu de rôle

Philibert : À quel moment interviens-tu dans la vie d’un jeu ?


Olivier : Comme je le disais, j’interviens surtout avant la mise en maquette, une fois que le texte est terminé. Je peux aussi revenir sur la maquette, mais c’est un autre travail et les éditeurs ne sont pas toujours enclins à payer une nouvelle passe sur la maquette, ce qui est compréhensible du point de vue des budgets impliqués. Néanmoins, il est vraiment important que les relecteurs se battent pour être reconnus et payés comme il se doit. Lorsqu’on nous paie au signe, relire mille signes deux fois, ça fait deux mille, pas mille. Le tarif doit donc prendre en compte ce signage. Mais comme c’est quelque chose de rare dans le JDR, il faut être très méticuleux dès la première relecture pour laisser passer le moins de choses possible.



Philibert : Quelles qualités doit impérativement avoir un relecteur ?


Olivier : La première, c’est la rigueur. Celle qui vous fait revenir sur une phrase lue trop rapidement. Celle qui vous fait vérifier les règles de grammaire avant de corriger sur une intuition, celle qui vous fait, enfin, respecter vos délais qui sont souvent très courts. Ensuite, il faut pouvoir se concentrer longuement, aimer la grammaire et ne pas avoir moins de 900 au certificat Voltaire qui est un excellent indicateur de votre niveau de français.



Philibert : Quelles sont les possibilités contractuelles pour travailler dans le monde du jeu en tant que relecteur ?


Olivier : Je ne sais pas si on peut être salarié, mais ce n’est guère souhaitable. En tant que freelance, on est vraiment payé à la tâche et, même s’il y a plus de sécurité, quand on est salarié, le risque de se voir confier énormément de travail pour un salaire toujours identique est assez élevé. C’est la raison pour laquelle beaucoup de traducteurs et de relecteurs sont en freelance.



Philibert : En France, est-il possible de travailler exclusivement dans le jeu ?


Olivier : J’en vis, et j’en vis bien. Mais je pense que nous sommes moins d’une vingtaine à vivre décemment du jeu de rôle en France. Je ne compte que les gens qui fabriquent du jeu, pas ceux qui travaillent autour. Les éditeurs, les auteurs, les traducteurs, les relecteurs, ceux-là sont très peu nombreux à vivre de leur travail. Personnellement, j’ai la chance d’être reconnu par mes différents collaborateurs et de ne pas avoir peur de négocier chaque contrat ; comme j’ai également une belle capacité de travail (entre 500 000 et 1 000 000 de signes par semaine), j’ai la chance de vivre de ma passion. Mais je ne pousserai pas un ami dans cette direction, parce que les places sont très réduites et qu’il m’arrive encore d’avoir des périodes plus difficiles ou des contrats hors JDR.


Olivier Larue, relecteur dans le jeu de rôle

Philibert : Côté rémunération, peux-tu nous en dire plus sur la manière dont est payé un relecteur dans le milieu ludique ?


Olivier : Je vais parler chiffres et sans langue de bois. Parce que c’est comme cela qu’on pourra faire avancer les choses dans un secteur encore peu reconnu et respecté. En tant que relecteur, vous ne devriez pas accepter de travailler en dessous de 20 € les 10 000 signes. Si on vous propose moins, ce n’est pas honnête au vu du travail demandé. Personnellement, je rechigne à travailler au-dessous de 25 € et je privilégie systématiquement les contrats qui paient le mieux. Il ne faut pas non plus accepter de relire gratuitement une maquette sous prétexte que c’est une maquette. La quantité de signes à relire, si vous voulez faire un travail de qualité, reste la même, le tarif ne doit pas être différent. Enfin, si vous relisez la maquette d’un texte que vous avez déjà lu avant sa mise en forme, vous ne devriez pas accepter de travailler pour moins de la moitié du prix de base. Votre temps et votre expertise ne devraient jamais être bradés, mais attention, ces exigences sont lourdes à porter, car il faut être à la hauteur des tarifs que vous réclamez et tendre à être irréprochable. Pour l’aspect plus administratif, comme le statut de relecteur n’existe pas vraiment dans le milieu éditorial (en dehors du salariat, s’entend), nous entrons dans la case auteur/traducteur et sommes donc payés en droits d’auteur. Nous cotisons à l’URSSAF du Limousin, ancien AGESSA.



Philibert : Qu’est-ce qui t’intéresse le plus dans ton métier ?


Olivier : Tout. La grammaire, la stylistique, le fait de lire du jeu de rôle. J’ai une chance incroyable et j’en suis conscient.



Philibert : As-tu un conseil pour les aspirants relecteurs ?


Olivier : J’en ai plusieurs : formez-vous, comme il y a peu de places, on ne prend que les meilleurs ; l’orthographe et la grammaire ne sont pas des options ; corriger les autres implique de savoir écrire soi-même au moins aussi bien ; ne vous bradez jamais et surtout, surtout, n’acceptez jamais de travailler gratuitement, parce que vous dévalorisez le travail de ceux dont c’est le métier et que vous vous soumettez à une forme d’exploitation cynique de la part de ceux qui vous présentent ce travail gratuit comme un privilège.



Philibert : As-tu une anecdote ou un souvenir marquant à nous raconter ?


Olivier : Un jour, j’ai été payé au tarif traducteur pour traduire un texte français… en français. Rien n’allait, il a fallu tout réécrire. Je l’ai fait savoir, on m’a payé le tarif traducteur et je peux désormais dire que j’ai traduit un texte du français au français !


*Voir nos conditions de Frais de port