Mêlant bluff et survie, Prey Another Day vous propose de vous amuser avec la chaîne alimentaire. Sensation au festival de Cannes 2024, le jeu faisait partie de nos coups de coeur du FIJ. Mais connaissez-vous l’histoire qui se cache derrière cette étonnante boîte ? Non, alors découvrez ses coulisses à travers 10 anecdotes à connaître absolument.
1. Des auteurs qui se connaissent de longue date
Matthew Dunstan et Brett J. Gilbert, les co-auteurs de Prey Another Day, se connaissent depuis de nombreuses années et n’en sont pas à leur première collaboration. Originaire d’Australie, Matthew a rencontré Brett à Cambridge en 2011 lorsqu’il est venu s’installer en Angleterre pour ses études.
“Nous concevons ensemble des jeux depuis plus de dix ans maintenant, et nous en avons publié plusieurs. Nous avons commencé à tester les jeux de l'autre, ce qui nous a amenés à créer des jeux ensemble. Notre groupe de playtest à Cambridge se réunit régulièrement depuis près de 13 ans, même si je n'y participe pas souvent, car je vis maintenant en Australie” précise Matthew.
Parmi leurs précédents jeux, se trouvent quelques titres bien connus comme Dice Hospital - Services d’Urgence ou encore La Guilde des Expéditions Marchandes.
2. Une genèse numérique
L’idée originale de Prey Another Day trouve ses racines sur internet. En 2015, Brett lança un site web, nommé Good Little Games, où il proposait des jeux gratuits à imprimer et à jouer qui ne nécessitaient que l'impression de 18 cartes - ou moins - avec éventuellement quelques jetons ou dés génériques. Le site accueillait des créations de Brett, mais également de Matthew et d’autres auteurs.
Quelques années plus tard, Brett et Matthew décidèrent de relancer le site avec une série de nouveaux jeux issus de leurs créations uniquement qui s'appelaient tous “Good Little [quelque chose]”. Good Little Hunters, qui allait devenir Prey Another Day, fut le cinquième jeu créé en 2017 pour le reboot du site. Matthew se souvient :
“L'idée, comme beaucoup d'autres idées pour la série Good Little, était motivée par le fait que nous ne pouvions travailler qu'avec 27 cartes. Nous étions tous deux intéressés par les jeux de bluff simples, et Prey Another Day représentait cette idée dans le cadre de cette restriction.”
3. Du digital au carton
À l'origine, Prey Another Day, ou plutôt Good Little Hunters, n’avait pas vocation à être publié officiellement. Les co-auteurs étaient simplement heureux qu'ils existent en version gratuite à imprimer sur leur site. Mais quelques années plus tard, en 2019, Brett et Matthew décidèrent de tenter leur chance auprès des éditeurs pour voir si leurs jeux pouvaient avoir une réelle existence dans le paysage ludique. Matthew nous en dit plus à ce sujet :
“Nous avions signé le jeu avec un autre éditeur à l'époque, qui nous a finalement rendu le jeu en 2022 après avoir décidé de ne pas donner suite. Puis, j'ai montré le jeu à Spielwiese à Essen 2022, et ils l'ont suffisamment aimé pour en prendre une copie chez eux et l'essayer, et à peine neuf mois plus tard, le jeu était sorti !”
Lars Frauenrath de Edition Spielwiese se rappelle cette découverte et la signature du jeu :
“Matthew nous a présenté plusieurs jeux, dont Prey Another Day. C'est l'un des prototypes que nous avons ramenés à Berlin. Et dès la première partie jouée au bureau, peut-être deux ou trois semaines après le salon, nous avons su que nous voulions publier ce jeu. Nous avions eu la chance d'avoir des amis avec nous, ce qui nous a permis de tester le jeu avec des groupes de toutes tailles. Je crois que j'ai envoyé un courrier à Matthew le soir-même. Nous avons été bouleversés lorsqu’il nous a répondu quelques heures plus tard que le jeu était toujours disponible.”
4. Un nom pas si facile à trouver
Comme beaucoup, le jeu a connu plusieurs patronymes au cours de son existence. De Good Little Hunters à Prey Another Day, le chemin a été long et tortueux. Lars nous fait part de la réflexion menée :
“Le prototype s'appelait encore Good Little Hunters. Et ce fut un vrai casse-tête pour trouver un nouveau nom. Nous voulions que le titre soit aussi spirituel et amusant que le jeu lui-même. Si possible, nous voulions qu'il contienne un jeu de mots.”
Dans sa version allemande, le jeu se nomme Schnitzeljagd, un nom qui remplit toutes les exigences de l’éditeur. Ceux qui maîtrisent la langue de Goethe appricieront l’habile jeu de mot. En allemand, “Schnitzeljagd” peut se traduire par “chasse au trésor” ou “jeu de piste”. Mais “Schnitzel” est également une escalope, l'un des grands plats traditionnels autrichiens et allemands. Ce qui est top pour un jeu où chaque animal doit chasser son propre morceau de viande…
5. À cinq ou six joueurs ?
Dans l’ensemble, les équipes éditoriales n’ont pas rencontré de difficultés particulières. La seule interrogation concernait le nombre de joueurs, comme l’explique Lars de Spielwiese :
“Le prototype était encore prévu pour être joué par six joueurs. Nous étions vraiment impatients de le faire jouer avec un groupe aussi important, car nous imaginions que ce serait un grand chaos et beaucoup d'amusement. Il s'est avéré que c'est le contraire qui s'est produit. Avec six joueurs à la table, le jeu devenait moins excitant. Nous l’avons testé plusieurs fois et avons rapidement décidé de réduire le nombre de joueurs.”
6. Une illustratrice de livres pour enfants primée
Les illustrations de Prey Another Day, pour les versions allemande et internationale, sont signées par l’illustratrice berlinoise Nele Brönner. Travaillant principalement dans le milieu de la littérature jeunesse, l’artiste réalise ici sa première commande dans le monde du jeu de société. Lars nous raconte sa découverte :
“La découverte de Nele a été une coïncidence extrêmement heureuse. J'étais sur mon canapé en train de parcourir Instagram et je suis tombé sur l’info d'une maison d'édition autrichienne, Luftschacht Verlag, qui venait de gagner un prix pour un livre pour enfants. Ce livre était illustré par Nele. Je me suis renseigné sur elle parce que j'étais intéressé par l'achat de quelques-unes de ses œuvres pour mon appartement. L'histoire du livre, intitulé Superglitzer, parlait de plusieurs animaux dans la forêt. Ce n'est que le lendemain que j'ai fait le rapprochement et que j'ai pensé que c'était ce que nous recherchions. J'ai envoyé le lien vers son livre à mes collègues et leur ai demandé ce qu'ils en pensaient. Le reste appartient à l'histoire.”
7. Surpriiiiise !
Prey Another Day est un jeu qui détonne dans le paysage ludique, par ses illustrations, mais également par ses couleurs. Si le choix de l’illustratrice a été mesuré et réfléchi, pour les couleurs, le résultat a été plus hasardeux. Lars nous en apprend plus à ce sujet :
“Nous n'avons jamais su à quoi ressemblerait le jeu en réalité, jusqu'à ce que nous recevions le jeu imprimé. La difficulté avec les couleurs Pantone est qu'elles ne peuvent pas être correctement affichées sur les moniteurs. Nous avons donc pensé à acheter une échelle de couleurs Pantone, ça coûtait 3 000 euros. Nous avons donc fait confiance à Nele, qui nous a envoyé des photos de sa gamme de couleurs. Mais il s'agissait encore d'une image numérique. Nous avons donc examiné les fichiers numériques et les avons approuvés pour l'impression sans jamais savoir ce que cela donnerait dans la réalité. Un coursier a livré les deux jeux à notre bureau la veille de la BerlinCon 2023. J'ai ouvert la boîte, j'ai regardé mes collègues et je crois que j'ai crié quelque chose comme : « L'ours est orange ! » Sur tous nos fichiers numériques, il avait l'air d'être rose-brun. Ce fut une très agréable surprise !”
Des couleurs flashy et “sauvages”, certes, mais qui contribue grandement au côté décalé du jeu. Le hasard fait bien les choses !
8. Nouvelle localisation, nouvelles illustrations
Pour l'édition française, Blackrock, en charge de sa localisation, a pris le parti d'en changer le graphisme. Stéphane Escapa que l'on connaît notamment pour Chabyrinthe, [Kosmopoli:t], Linq, ou plus récemment Château Combo, en signe les illustrations qui donnent au jeu une toute nouvelle identité.
Si ce changement a fait un peu jaser sur les réseaux sociaux, pour Lars, qui adore cette nouvelle version, il n'y a pas matière à débat :
"Nos partenaires internationaux sont les experts de leur marché national et savent donc ce qui est le mieux pour le jeu."
9. Changements dans le casting animalier
Concernant les personnages principaux, l’éditeur allemand a opéré quelques changements dans le casting en remplaçant deux des animaux par d'autres. Ainsi, dans le prototype, le lynx était un renard et le hibou un corbeau.
10. Les champignons, sixièmes personnages du jeu
Dans la version originale comptant les illustrations de Nele Brönner, les champignons y sont très présents et deviennent une sorte de sixième personnage du jeu comme le considère Matthew. Les joueurs peuvent d’ailleurs s’amuser à les repérer dans chacune des cartes des cinq animaux principaux. Dans la version française, l’aspect anthropomorphique des fonges a disparu des illustrations de Stéphane Escapa.